Intouchables
Quelles que puissent être ses qualités, le succès imprévu de cet automne-hiver, Intouchables, demeure un film que l'on regarde avec quelque chose comme un fond de réticence. En examinant avec un peu d'attention cette production française qui se hisse, en termes de nombre d'entrées, à la hauteur des superproductions anglo-saxonnes destinées à drainer les spectateurs par millions -et ce n'est pas un mince exploit!-, on bute quand même sur ce qu'il faut bien appeler une gêne face à une comédie roublarde; eh oui! roublarde.
Bien sûr, on nous l'a dit, redit, il s'agit d'un pur divertissement, ayant avant tout vocation à sortir un peu de leur pessimisme insondable ces Français dont la morosité record est devenue un sujet de thèse; je veux bien l'admettre; mais il reste que c'est un film qui ne remet en cause d'aucune façon l'ordre social; ou plutôt qui, en dépit des apparences, ne remet nullement en cause le désordre social.
Film dénonçant le racisme en donnant à admirer l'amitié exceptionnelle entre deux êtres que tout sépare a priori, Intouchables est, qu'on le veuille ou non, un film de culture TF1: "l'autre" est dangereux (voir le personnage du petit frère), mais heureusement il y a toujours chez "l'autre" quelqu'un avec qui ce qui est impossible face à l'ensemble le devient au niveau des relations strictement interindividuelles.
J'ai passé un bon moment avec François Cluzet et Omar Sy, mais malgré tout, si le conte est bon, sur le plan de la question sociale, le compte n'y est pas.