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Marc Laroche, peinture
10 janvier 2012

Le vaisseau des morts

Notes de lecture

 

Le vaisseau des morts de B. Traven

 

Que l'on ne sache pas précisément qui fut exactement l'homme qui se cachait sous le pseudonyme de B. Traven ou sous d'autres masques littéraires importe peu pour ce que l'on a à dire ici du roman Le vaisseau des morts.

Ce livre, lisible en français dans une édition publiée à La Découverte, et dans une traduction signée Michèle Valencia, est une oeuvre d'une très grande force, écrite (en allemand) avec un lyrisme étrangement opérant. Ce récit à la première personne d'un paria absolu, et qui est un hymne à la volonté de rester libre et digne en toutes circonstances, nous fascine non seulement par le caractère extraordinaire de ce qui est raconté: l'odyssée d'un homme qui n'a plus d'autre Ithaque qu'intérieure à rejoindre, mais aussi par la texture même de l'écriture; en effet, lorsqu'on a trop vite admis que par exemple le Voyage au bout de la Nuit, publié en 1932, constituait un "an 1" d'une espèce nouvelle de littérature "désenchaînée", la découverte de ce texte perpétuellement aux confins de l'écriture, bourré d'argot et en même temps d'une "tenue" et d'une dignité exceptionnelles, et qui fut publié dès 1926, nous permet de placer dans une chronologie revisitée les étapes importantes de la création littéraire au cours du XXè siècle.

Il n'est qu'anecdotique de savoir si l'on peut classer ce livre dans une case réservée à l'expression d'une pensée anarchiste, car c'est d'abord par son humanité, teintée simultanément de réalisme et d'un humour toujours un peu irréaliste, que cet autre voyage au bout de la nuit, la nuit des soutes et des chaufferies infernales où des marins esclavagisés ont perdu toute identité, nous transporte.

Après Joseph Conrad, la littérature de la mer aurait pu ne pas retrouver d'écrivain du souffle de l'auteur de Typhon; eh bien ce n'est pas le cas: avec Le vaisseau des morts, c'est une œuvre majestueuse dans laquelle voudront s'embarquer pour une inoubliable traversée tous ceux qui ne peuvent se passer de relire Le Nègre du Narcisse ou Lord Jim.

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